Lutte antisecte: le réquisitoire de Janine Tavernier (17/11/2006)

medium_images.27.jpgJanine Tavernier est bien connue des spécialistes de la question sectaire. Entrée dans le mouvement anti-sectes en raison de l'embrigadement de son mari dans l'organisation Ecoovie, Jeanine Tavernier a longtemps présidé l'UNADFI (de 1993 à 2001), principale organisation de lutte contre les sectes. On ne peut l'accuser d'angélisme. Son propos critique sur l'approche anti-sectes actuelle est d'autant plus à prendre au sérieux, confirmant de nombreuses appréciations convergentes (dont la mienne, cf note du 8 juin 2006). Pour Janine Tavernier, on pèche aujourd'hui par amalgame en mélangeant tout.

Dans un entretien publié le 17 novembre 2006 par le quotidien Le Monde, elle donne un exemple tiré du terrain que j'étudie. Je cite: "Je m'inquiète lorsque j'entends la présidente de l'Unadfi, Catherine Picard, critiquer à La Réunion les "Eglises évangéliques" sans distinction." Il y a en effet de quoi s'interroger quand on identifie comme sectaires entre 200 et 500 millions de chrétiens (la fourchette dépend du fait que l'on compte, ou non, les charismatiques-pentecôtistes parmi les évangéliques). Incompétence? Anti-américanisme? Démagogie? Probablement un peu des trois.

Janine Tavernier poursuit en observant une politisation du mouvement UNADFI. Comme si la question des "sectes" pouvait servir d'instrument commode pour s'acheter un brevet de républicanisme à peu de frais, quitte à prendre des libertés avec les faits. L'hypothèse "secte-prétexte", en somme, où le thème de la secte est agité, moins pour appréhender en profondeur le phénomène, que pour atteindre d'autres fins.

 Elle va jusqu'à parler d'une dérive vers la "chasse aux sorcières" amorcée en 2001, critiquant successivement Alain Vivien, puis Jean-Michel Roulet, actuel président de la MIVILUDES (mission interministérielle de lutte contre les dérives sectaires). Bigre! De tels commentaires (à lire en texte intégral sur le site du Monde) suggèrent que dans les mois qui viennent, la question de la gestion publique des problèmes sectaires va être l'objet de débats et de reconfigurations.

L'enjeu: arriver à un pilotage efficace et compétent du phénomène, en s'inspirant plus des spécialistes, et moins des fantasmes.  Laissons le mot de conclusion à Janine Tavernier: "Ce que je demande, c'est qu'on prenne le temps de la réflexion et qu'on évite les amalgames."

 

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