Le sauveur était pentecôtiste (16/05/2006)

Non je ne parle pas de Jésus, ni de Zineddine Zidane venu l’an dernier assurer la qualif’ de l’équipe de France de football. Je parle de la fameuse histoire d’Arezki Belarbi, un enfant tombé dans le canal de la Marne-au-Rhin à Vendenheim (Alsace) le 20 avril 2006, et sauvé des eaux par un inconnu.

Le père de l’enfant, Ali Belarbi, avait qualifié ce mystérieux sauveteur de «véritable ange» (dépêche AFP du 22 avril 2006, 17H32). Les télévisions s’étaient émues de cette affaire : au lieu de se signaler, le sauveteur avait préféré conserver l’anonymat. Qui était ce sauveur masqué? On connaît aujourd’hui la réponse: il était pentecôtiste.

Le jeune-homme en question, qui n’a pas hésité à plonger deux fois pour récupérer le petit Areski, s’appelle Timothée Gross, 22 ans, membre de l’Assemblée évangélique de Pentecôte de Strasbourg. Finalement identifié, il a été décoré par le Ministre de l’Intérieur le 5 mai dernier.

Un article des Dernières Nouvelles d’Alsace du samedi 6 mai 2006 (en page Région), intitulé « Merci Seigneur pour cette mission », nous en apprend un peu plus. Il n’est plus consultable gratuitement sur le site des DNA, mais on peut en trouver le texte intégral sur un portail évangélique intitulé Voxdei.
Je trouve cette histoire révélatrice de ce qu’on appelle l’ethos chrétien. L’ethos, c’est l’éthique vécue. Dans la culture protestante évangélique, l’accent sur l’expérience et le vécu est essentiel. Comme le dit Jean-Paul Willaime, « dans le régime évangélique du croire, la meilleure preuve de l’existence de Dieu, c’est le fait que des individus le louent et le manifestent à travers des vies transformées”. Ce fait divers illustre une mise en pratique de l’éthique chrétienne à deux niveaux: d’abord, secourir son prochain. Ensuite, ne pas en retirer de gloire personnelle.

Interrogé par les Dernières Nouvelles d’Alsace, le sauveteur improvisé (dont l’identité a été révélée par un collègue de travail) souligne ce n'est pas à lui de «revêtir la gloire» de ce geste, mais «au Christ». Il précise aussi: «Quand j'ai plongé la première fois, je ne pouvais pas voir l'enfant sous l'eau. Je suis ressorti, puis j'ai replongé et demandé au Seigneur de m'aider. C'est grâce à Lui que j'ai pu trouver la main de l'enfant. Je ne crois pas au hasard... Merci Seigneur pour cette mission.»

On voit ici l’impact de la conviction religieuse sur la confiance en soi : la prière, le ressenti subjectif de l’aide divine, mettent en action l’individu, lui permettent d’affronter un haut niveau de risque, car il a le sentiment que «le Seigneur va (l’) aider». Cette dynamique militante n’est pas toujours dirigée vers des fins aussi édifiantes!

Mais cela n’enlève pas à ce fait divers son caractère révélateur. On nous a beaucoup parlé, il y a quelques mois, du «choc des civilisations», qui serait nourri du choc islam-évangélisme… Cette brève rencontre française entre un musulman et un pentecôtiste nous narre autre chose: vivre des options différentes et concurrentes peut aussi s’exprimer sur le mode du souci de l’autre (au risque de se «mouiller») plutôt que sur celui de sa négation.

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