Le buteur brésilien qui "parle toujours de Dieu" (24/06/2006)

medium_Kaka.jpgL'équipe de France, enfin qualifiée, poursuivra-t-elle son ascension vers les sommets ? Après la victoire des Bleus contre le Togo, les paris sont ouverts. Une quasi-certitude, toute équipe qui ira loin dans ce Mondial de foot 2006 risque de rencontrer sur sa route le Brésil, archi-favori. Dans L’Equipe de lundi dernier (19 juin), un de ses joueurs phares s’est exprimé sur une pleine page (p.11). Il s’agit de Ricardo Izecson dos Santos Leite, surnommé Kaka (le surnom passe mieux en portugais qu’en français). Ce qui a attiré mon attention, c’est que ce joueur exprime, dans son interview, une foi religieuse intense. Titre : « J’ai gardé mes valeurs ».

Dans le contenu de l’article, des développements substantiels sur sa foi : «je parle toujours de Dieu», «je prie, je prêche ce que je pense être bon pour moi et je le fais pour les autres»… Encore : «Dieu est ma vie. Je vis avec Lui. Ma foi a grandi grâce à l’éducation que mes parents m’ont donnée à travers la Bible, Dieu et jésus. Petit à petit, j’ai commencé à vivre ma propre expérience avec Dieu. Aujourd’hui, je place tant d’espérance en Lui». Point de théologie de la prospérité : il explique ne pas prier pour la victoire, mais pour une «bonne partie, pour jouer le mieux possible et que personne ne se blesse». Enfin, il souligne avoir voulu rester vierge jusqu’au mariage en raison de ses convictions religieuses. Accent sur une relation personnelle avec Dieu, qui reconfigure la vie autour d’une nouvelle ascèse (y compris dans le refus du sexe hors mariage), souci du témoignage, expérience de la présence divine au quotidien….Tiens tiens, ces propos me rappellent les évangéliques que j’étudie…. Vérification faite, le champion de football est effectivement protestant évangélique. Il s’est d’ailleurs marié dans une église évangélique de Sao Paulo le 24 décembre dernier, en présence de Ronaldo et Roberto Carlos, de la Seleçao. D'après l'encyclopédie Wikipedia, il serait membre de longue date de l'association "Athlètes pour Dieu" (Athletes for God), et il ne manque jamais une occasion de partager sa foi. 

Kaka le buteur constitue un témoin de plus de la spectaculaire percée protestante évangélique au Brésil (environ 20% de la population). Huit ans après le Mondial de foot en France, où quelques footballeurs brésiliens s’étaient déjà signalés par leur foi évangélique communicative, Kaka nous rappelle aujourd’hui que la pénétration évangélique, qu’elle soit dans le foot, la politique ou l’économie, est désormais une réalité forte et durable dans la société brésilienne. Au sein du monde médiatique dans lequel nous vivons, qu’un footballeur de cette trempe fasse écrire, sur ses chaussures, «j’appartiens à Jésus» n’est évidemment pas sans conséquences: les évangéliques n’hésitent pas à mettre en avant ce champion, notamment dans un tabloïd intitulé Quart d’heure pour Jésus, diffusé à l’occasion du Mondial de foot. Andy Warhol disait que tout le monde peut devenir célèbre pendant un quart d’heure: pour les évangéliques, chaque quart d’heure de foot animé par les célébrités qui partagent leurs convictions sont manifestement bons à prendre... pour étoffer l'équipe de Jésus.

 

Pour compléter : trois jours après cette note, Libération a consacré un bon article au phénomène des évangéliques dans le foot brésilien. Voici le lien: Un Brésil trop Amen

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