Encore des tombes musulmanes profanées (France) (27/12/2011)

images.jpegL'information est tombée hier (26 décembre 2011): un cimetière d'anciens combattants musulmans à Carcassonne (France) a encore été profané.

Sur les tombes, on pouvait lire "la France aux Français, les Arabes dehors", "les Arabes, dégagez" ou "sales Arabes" et même "sales juifs".

Abdallah Zekri, vice-président du Conseil régional du culte musulman (CRCM), également président de l'Observatoire des actes islamophobes (OAI), a signalé à cette occasion "l'augmentation très importante et très inquiétante" des actes islamophobes en France.

Racisme, islamophobie, et un zeste d'antisémitisme se combinent ici. Cet événement lamentable, symptôme de plus d'une société française en quête de boucs émissaires, incapable d'ouvrir des perspectives pour une jeunesse sacrifiée sur l'autel des "avantages acquis" (cf. Louis Chauvel), s'inscrit dans un contexte plus large: celui de l'inflation des profanations de lieux de culte et de cimetières.

 

stéphanie lebars,france,islam,christianisme,judaïsme,christianophobie,islamophobie,antisémitisme,profanations,lieux de culte,cimetières,claude bodin,abdallah zekriDoublement des profanations en trois ans (France)

Stéphanie Lebars, sur son blog, nous rappelait, le 29 novembre 2011, que le nombre de profanations de lieux de culte et de cimetières a fait plus que doubler en trois ans, passant de 304 en 2008 à 621 en 2010.

Fin octobre 2011, 509 affaires de ce type avaient déjà été signalées.

 

Ces données proviennent, souligne Stéphanie Lebars, du groupe d’études sur la politique de prévention et de lutte contre les profanations des lieux de culte et des cimetières, que préside le député Claude Bodin (UMP, Val-d’Oise). Comment se répartissent, par religion, ces déprédations ?

 

Sans surprise, on remarquera que les faits concernent majoritairement des lieux chrétiens. Stéphanie Lebars donne ces chiffres, fondés sur les données du groupe d'étude de l'Assemblée nationale: 308 églises et 214 cimetières chrétiens ont été profanés en 2010, ce qui donne des chiffres en augmentation de 33 % par rapport à 2009. En seconde position, on compte des lieux musulmans (50 mosquées et 7 cimetières, +216%), et enfin des lieux juifs (30 synagogues et 12 cimetières, -36% après une hausse spectaculaire entre 2008 et 2009).

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2011: 509 déprédations (à dater de fin novembre)

Les chiffres pour 2011, pas tout à fait complets à la date de remise du rapport à l'Assemblée Nationale, faisaient état de 434 actes de dégradation dans les sites chrétiens, 41 sur les sites musulmans et 34 sur les sites juifs. Ces derniers éléments indiqueraient un "tassement de tendance" en matière de profanations islamophobes par rapport à 2010 (contrairement aux propos d'Abdallah Zekri), et au contraire, une reprise à la hausse en matière de christianophobie.

Au-delà des réactions à chaud, restent tous ces faits, inacceptables quels que soient les contextes et les confessions religieuses en cause: suivant les derniers chiffres disponibles (portant sur 509 déprédations, 434+41+34), 85% des profanations toucheraient des sites chrétiens, 8% toucheraient des sites musulmans, et 7% des sites juifs.

 

Unknown.jpegDes sites juifs proportionnellement plus touchés que les autres (France)

Il est utile de comparer ces éléments avec le ratio par confession: en proportion de la population française "religieuse (par croyance ou par culture)" (calcul basé sur environ 47 millions de personnes, rattachables à une confession religieuse), les "chrétiens" représenteraient environ 86% des fidèles, l'islam 11%, et le judaïsme 1,5%.

Ces chiffres donnent des ordres de grandeur. On pourrait les discuter à l'infini dans le détail, nous les prenons ici simplement comme des indicateurs, invitant à effectuer les hypothèses suivantes: en dépit d'un indéniable "bond" islamophobe, en particulier entre 2009 et 2010 (+216% d'actes recensés sur cette période), les déprédations antimusulmanes restent proportionnellement moins importantes que les déprédations antichrétiennes. Mais l'écart se réduit.

Restent les déprédations antijuives, qui apparaissent proportionnellement (au prorata de la population juive) BEAUCOUP PLUS IMPORTANTES que les déprédations antichrétiennes ou antimusulmanes.

Soyons concret: s'il y avait répartition analogue des "phobies" actives, on devrait compter, dans le total des déprédations, 1,5% environ de profanations judéophobes. Or, le pourcentage est de 7%. Cette sur-proportion était déjà notée en 2010, et au cours des années précédentes.

 

Sur la durée, s'il est un phénomène indiscutable, c'est bien celui-ci: en dépit d'une population française juive peu nombreuse par rapport à la population musulmane (sans parler de la population chrétienne), les déprédations judéophobes se maintiennent à un niveau étonnamment élevé, qui pourrait inviter responsables chrétiens et musulmans à une solidarité de principe à l'égard de leurs collègues juifs.

Quant à la tendance de fond, elle est préoccupante: que ce soit contre les cibles musulmanes, juives ou chrétiennes, les déprédations augmentent à vive allure (bien qu'il faille nuancer au regard d'un taux de signalement qui s'améliore).

L'enjeu républicain est clair: traiter ces actes antichrétiens, islamophobes et antisémites avec la même rigueur laïque.

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