Boko Haram, l'épouvantail islamiste du Nord Nigéria (12/11/2011)

_56495241_nigeria_damaturu_1111.gifAlors que le ministre français des Affaires Etrangères, Alain Juppé, entame une visite en Afrique du Sud et au Nigéria, qui connait, dans le monde francophone, Boko Haram?

Non, ce n'est pas une marque de bonbons à la coco, ou le dernier groupe de world music à la mode. Il s'agit d'un mouvement islamiste nigérian particulièrement meurtrier, qui sévit dans l'indifférence de la plupart des médias francophones.

Basé au Nord du Nigéria, immense Etat fédéral convoité pour ses ressources pétrolières, Boko Haram a été annoncé plusieurs fois sur le déclin. Il est en réalité plus puissant que jamais, comme le rappellent régulièrement, ces derniers mois, d'excellents reportages proposés par la BBC.

Jonah Fisher, il y a une semaine, écrit par exemple que "loin de disparaître, les militants islamistes du Nigéria se renforcent".

L'ambition des tueurs de Boko Haram est simple: instaurer par la violence un Etat islamique, faire régner la Charia sur tout le pays (et pas seulement dans le Nord où elle est déjà appliquée) et rejeter tout ce qui vient de l'Occident. Boko Haram signifie littéralement: éducation occidentale = péché. Quant à la concurrence confessionnelle? La solution est simple: contraindre les chrétiens à la défensive, à la fuite ou à la conversion forcée.

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Parfois comparé à une secte, Boko Haram repose sur un islamisme dur, qui comprend le Djihad non pas seulement de manière spirituelle, mais de manière très concrètement guerrière, cautionnant jusqu'au massacre de civils, en particulier chrétiens.

Depuis cet été, plusieurs massacres ont été perpétrés, principalement en direction d'institutions gouvernementales (y compris des écoles), avec plus de 500 morts et des milliers de blessés. Une ou deux mosquées ont été brûlées, lorsqu'elles apparaissent soutenir le gouvernement.

Quant aux églises détruites ou endommagées, c'est par dizaines qu'on les compte, principalement catholiques et évangéliques (20% de la population nigériane serait évangélique).

 

Chrétiens ciblés dans les attaques?

CM Capture 1.jpgLe dernier massacre en date s'est produit à Damaturu, avec au moins 63 morts, au début de ce mois de novembre. Soupçonné de soutiens extérieurs (et de bases en Somalie, ce qui paraît un peu surprenant), ce mouvement a été accusé cette semaine par l'organisation International Christian Concern (ICC) de cibler systématiquement les chrétiens. Les éléments d'accusation?

Une enquête locale, fondée sur des interviews, dont celui d'Idris Garba, de l'Etat de Yobe (où s'est produit le dernier massacre). "Ils demandaient si l'on était chrétien, ou musulman. Si l'on répondait chrétien, on était tué", rapporte-t-il. Parmi les nombreuses victimes, surtout des catholiques et des protestants évangéliques.

 

 Eradication confessionnelle

Rappelons que le schéma ethnopolitique du Nigéria est d'une extrême complexité, que les relations islamo-chrétiennes y sont souvent bonnes, et que si l'islamisme politique dérape dans la violence, les chrétiens sont loins d'être tous des enfants de coeurs. On compte aussi, dans l'histoire récente du Nigéria, quelques massacres de musulmans par des chrétiens.

Mais ces massacres sont asymétriques, et il est un peu facile de renvoyer tout le monde dos à dos. En l'ocurrence, des groupes comme Boko Haram n'ont pas d'équivalent, au Nigéria, côté chrétien.

nigéria,boko haram,islamisme,liberté religieuse,afriquePar leur politique d'éradication confessionnelle, ils contribuent, certes marginalement, à nourrir des logiques diasporiques. La forte montée en puissance en Europe (y compris en Italie) d'Eglises évangéliques nigérianes ne doit certes que très peu à ces phénomènes. Mais on aurait tort de les considérer pour autant comme négligeables, tant ils participent à une polarisation aux effets géopolitiques imprévisibles.

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