Le Superbowl, finale du football américain, s’est conclu à Miami le 4 février 2007 par la victoire des Indianapolis Colts contre les Chicago Bears (par 29 à 17). C’est l’événement sportif numéro un aux Etats-Unis. Cette année, pas de «nipplegate» comme en 2004, où le sein découvert de Janet Jackson avait déclenché le scandale. En revanche, une autre figure afro-américaine fut à l’honneur, en l’occurrence, le légendaire entraîneur des Colts, Tony Dungy (photo), qui a témoigné urbi et orbi d’une foi protestante évangélique à toute épreuve.
Comme des millions d’afro-américains, Dungy est un chrétien évangélique de confession baptiste (branche principale du protestantisme aux Etats-Unis). Très fervent, il a expliqué devant les cameras de CBS, lors de la cérémonie de la victoire, «être très fier de représenter les coachs afro-américains », mais «plus que tout», a-t-il ajouté, il est fier d’avoir remporté la victoire «en respectant le chemin de Dieu» (God’s way).
A noter que le même Dungy avait participé le jour précédent un petit déjeuner de prière d’avant Superbowl, organisé par Athletes in action (association évangélique), où il avait également martelé ses convictions chrétiennes. Avec son ami Lovie Smith, il y soutint notamment que la Parole de Dieu est plus importante que n’importe quel événement sportif, même publicisé à l’échelle mondiale.
Pour couronner cette semaine pieuse, rappelons que le 1er février 2007 a eu lieu le 55e National Prayer Breakfast à Washington (petit-déjeuner de prière présidentiel), durant lequel le président Bush Jr a célébré les Etats-Unis comme «une nation en prière».
Cette succession rapprochée de grands événements télévisuels marqués par la religion et le témoignage public nous rappelle un point que j’ai développé dans Dieu bénisse l’Amérique. La religion de la Maison Blanche : si, en France, la religion est souvent perçue comme du domaine du particulier, elle relève au contraire, aux Etats-Unis, du domaine de l’universel. En France, la foi est invitée à la discrétion, aux Etats-Unis, elle s’affiche.
Cette divergence culturelle reste bien là entre les deux rives de l’Atlantique, même si divers indices suggèrent qu’elle est peut-être moins grande que par le passé (1). Autant on ne peut aucunement exclure que tel ou tel entraîneur d’équipe sportive, en France, soit catholique ou évangélique convaincu, autant il est difficilement concevable de l’entendre proclamer, devant les caméras de Canal +, la suprématie de Jésus.
Pour les branchés d'astrologie, cela semble en revanche plus facile (2).
(1) tendance à la laïcisation croissante de l’espace public aux Etats-Unis, tendance récente mais nette, chez les églises françaises, à revaloriser l'évangélisation explicite, comme en témoigne le dernier colloque de l’ISEO ("évangélisation et prosélytisme", 30 janv-1er février 2007)
(2) L'entraîneur de l'équipe de France, Raymond Domenech, n'a guère fait mystère, dans les médias, de son intérêt pour l'astrologie (y compris dans sa perception des joueurs).