Soutenance HDR (Habilitation à Diriger des Recherches)

Je voudrais remercier toutes et tous pour leur contribution décisive à ma soutenance d’Habilitation à Diriger des Recherches, tenue ce mercredi 12 février 2025. Durant 4H30, à partir de 9H du matin, l’occasion m’a été donnée de discuter de mon parcours de recherche, étalé sur 35 ans, dont 27 passés au GSRL.  

Mon jury était composé des professeurs Patrick Cabanel (EPHE-PSL, garant, notamment auteur de « Le droit de croire »), ainsi que de Valérie Aubourg (Ucly), Pierre-Yves Kirschleger (Université Paul Valéry), Nathalie Luca (CESOR), et Philippe Portier (EPHE-PSL) ;

Je remercie l’EPHE-PSL et la Maison des Sciences de l’Homme (MSH) à Paris, 54 Bd Raspail, pour son accueil et l’octroi de la salle 1, suffisamment grande pour accueillir une cinquantaine de personnes. L’idéal pour cette soutenance pour durer jusqu’à 13H.

 

Très reconnaissant pour le jury ainsi que pour les nombreuses personnes venues, parfois de loin (Lyon, FUTP Bruxelles) pour l’événement, à la fois aboutissement d’un premier parcours après la thèse, mais surtout tremplin pour pouvoir diriger à plein des doctorats dans le cadre de PSL.

Pour le dépôt de l’HDR, 3 mémoires sont requis. Le 1er revient sur le parcours de recherche, en montre les articulations, avec une petite dimension d’autobiographie intellectuelle ; le 2^e est un recueil de travaux publiés ; le 3^e est un mémoire original. Le morceau de choix reste le mémoire original ; le mien se déploie, sur 588 pages (dont quelques cahiers d’illustrations, une chronologie, et naturellement une bibliographie copieuse).

 

Le sujet: « Croire et prospérer. Théologie(s) de la prospérité en perspective postcoloniale, Redéploiements francophones depuis les années 1950 »

 

L’HDR a débuté par une présentation liminaire ; j’ai finalement pris 25 minutes, tenant à développer d’abord mes remerciements, adressés en particulier à mon laboratoire, le Groupe Sociétés Religions Laïcités, à mes collègues et ma famille. Un plaidoyer pro-domo m’a ensuite donné l’occasion d’honorer et défendre le CNRS et la recherche en Sciences Humaines et Sociales, soulignant l’importance de continuer plus que jamais à valoriser les travaux auprès des citoyennes et des citoyens, dont les impôts financent la recherche. J’ai terminé mon introduction par le rappel des 8 dominos (thèmes de recherche) qui se sont successivement activés, l’un entraînant l’autre, d’un mémoire sur de Gaulle en Iran jusqu’aux théologies de la prospérité en Afrique et dans ses territoires circulatoires.

 

Ces répertoires chrétiens de la prospérité se sont recomposés en terrain francophone, en particulier africain, dans un contexte très différent du Prosperity Gospel états-unien (plus connu) dont il s’est inspiré au départ ; ils demandaient à être auscultés. Entre sédimentation historique, caractéristiques partagées, atouts sociaux, dérives et types de répertoires (au nombre de sept), les milieux chrétiens francophones sensibles aux théologies de la prospérité s’inscrivent dans une situation postcoloniale.

 

Patrick Cabanel, qui fut un garant encourageant et vivifiant, a ensuite ouvert le ban, avec sa verve inimitable, pour revenir sur le parcours présenté ; ses propos, comme ceux des collègues qui ont suivi, sont d’une richesse qu’on ne peut résumer en quelques lignes. Signalons seulement une pépite bibliographique que Patrick Cabanel a rappelé, nourrissant, en historien d’exception qu’il est, la réflexion comparatiste. Ce livre magistral est celui d’Edward P. Thompson sur la formation de la classe ouvrière anglaise.  

 

 Après Patrick Cabanel, ce fut au tour de Nathalie Luca d’emboîter le pas. Déjà autrice de l’un des trois pré-rapports, elle a rappelé les lignes de force du parcours présenté et proposé plusieurs pistes de réflexion à poursuivre. Parmi ces pistes stimulantes, la comparaison megachurch-start-up, l’importance d’un regard croisé avec la Corée du Sud et l’Asie du Sud-Est, et cette interrogation de fond : ces milieux chrétiens de la prospérité ne seraient-ils pas des bulles de confort, qui grossissent, puis explosent ?

 

C’est ensuite l’historien Pierre-Yves Kirschleger, auteur aussi d’un pré-rapport, qui est entré dans la ronde, apportant une relecture très fine -repérage des coquilles, aide précieuse en vue de la publication- ; l’enjeu posctolonial, l’effet des Plans D’ajustement Structurel du FMI sont mis sur la table. Il a aussi souligné l’importance d’approfondir le travail de contextualisation historique, rappelant au passage que l’histoire politique & économique des pays africains traités est très diversifiée. Quid, par exemple, des expériences soviétiques traversées par certains ? L’occasion de rappeler le récit de Petit Piment, d’Alain Mabanckou.

 

La soutenance HDR a ensuite fait une pause, reprenant avec la prise de parole de Valérie Aubourg, notamment co-autrice d'un très beau livre sur immigration et catholicisme. Elle développe l’analogie du bon vin, qui a besoin de temps pour s’affiner.

Elle porte notamment l’accent sur la question du clientélisme politique ; Valérie Aubourg invite aussi à affiner et développer plus soigneusement la comparaison avec le catholicisme, suggérant que l’ecclésiologie catholique pourrait être finalement plus impactante, dans les milieux étudiés, que le modèle de l’Action catholique.

 

C’est enfin au tour du président de séance, Philippe Portier, de conclure la longue matinée d’échanges par une série d’analyses très ciselées, comme il en a le secret, autour de la critériologie à affiner en matière de types de répertoires.

Il revient également sur le débat autour de la sécularisation : ces théologies de la prospérité sont-elles signes de la sécularisation du christianisme, où réenchantent-elles le capitalisme ? Philippe Portier suggère d’inscrire ces phénomènes dans le « secular turn ».

Après avoir délibéré et annoncé l’heureuse issue, le jury a clôturé la séance un peu après 13H30. La présence très attentive d’une assistance diversifiée n’a pas été pour rien dans le bouquet final des discussions conviviales qui se sont poursuivies autour d’un pot.

Champagne, merci à toutes et tous !

Et publication du mémoire d’HDR à suivre, dans quelques mois…