Me voici pour quelques jours aux Etats-Unis, dans l’état de l’UTAH. Connaissez-vous l’emblème de l’Utah ? C’est la ruche, en référence à l’ardeur infatiguable des abeilles. Cet emblême convient très bien à une terre de pionniers où on sait ce que c’est que de travailler dur. Par mon parcours, mon milieu et ma sensibilité personnelle, je suis volontiers «en phase» avec cette culture américaine du travail, que je trouve à bien des égards admirable.
Sur l’avenue qui conduit au congrès de l’ASCH (American Society for Church History) auquel je participe actuellement, je me suis arrêté à un petit restaurant (le Millcreek Coffee Roaster) qui torréfie devant vous des cafés qui viennent des 4 coins du monde. Les machines sont impressionnantes (voir ci-dessous).
L’homme responsable de ces torréfacteurs travaillait là à midi, quand je me suis arrêté la première fois. Il y travaillait encore à 7H du soir, quand je me suis arrêté au retour. Dans la chaleur, les effluves de café (agréables ponctuellement, mais à la longue?), cet homme ne ménageait pas sa peine, digne héritier des bourreaux de travail qui ont construit, en plein désert et à 1320 mètres d’altitude, Salt Lake City. Respect ! Mais cette culture du travail n’a cependant pas que des avantages, et à force de bourdonner, les abeilles peuvent sombrer. «Travailler plus pour gagner plus» n’est pas toujours la panacée. La preuve ci-dessous.
Un sociologue américain, John de Graaf, est actuellement en tournée de conférence à Salt Lake City. Il a été présenté dans le Salt Lake Tribune du 12 avril 2007, que j’ai lu en mangeant un Bagel. Son thème d’étude : les effets pervers du travail à outrance. Coordinateur du mouvement états-unien «Take Back Your Time» (retrouvez le temps de vivre), que dit John de Graaf?
Que les Américains travaillent plus aujourd’hui que les serfs au Moyen-Âge. Selon des études incontestables, les Européens de plus de 55 ans auraient deux fois moins de chances que les Américains d’attraper des maladies chroniques comme l’hypertension. «Nous sommes de très loin la nation la moins en bonne santé parmi les nations industrialisées, alors que nous dépensons près de deux fois plus pour notre système de santé», souligne de Graaf.
La vie familiale en prend un coup aussi. En 1997, 83% des familles américaines déclaraient partager au moins 4 fois par semaine un repas ensemble. Le pourcentage est descendu à 75% en 2004, avec toutes les conséquences imaginables en terme de manque de suivi des enfants (hausse de la consommation juvénile de drogue). Alors, faut-il vraiment «travailler plus pour gagner plus?» Peut-être, mais pas à n'importe quel prix.
Attention aux conditions d’application et gare à l’angélisme, sinon les conséquences pourraient fort bien être: «Travailler plus pour perdre plus».
Commentaires
Certains politiques reprochent aux français de ne pas suffisement travailler. Or, les français sont les travailleurs plus productifs au monde après les américains et en même les plus attachés à leurs "ponts" et autre congés payés. Si le travail constitue un repère important dans la vie, il est aussi vital de respecter un équilibre; la vie de famille, les amis, l'investissement association ou ... tenir un blog contribuent également à l'épanouissement des "travailleurs". Je pense aussi au travail du dimanche. Bien qu'étant non chrétienne, j'y suis particulièrement hostile. En ce sens, le consommateur ne doit jamais oublier qu'il est aussi un salarié ...
Bonjour,
Pour moi, la question du travail est vue à l'envers.
Elle n'est vu que d'un oeil productiviste, et l'humain est bel et bien l'esclave de cette "déesse" économie.
Cependant il me semble que le travail est, avant tout, autre chose qu'économique (même s'il est économique, naturellement).
Le travail me semble avant tout relever du lien social. C'est pour cela qu'on parle d'insertion par le travail (sauf que cette insertion doit de plus en plus remplir des conditions économiques qui la fait dévier de ses objectifs).
Ainsi, lorsque j'aide un ami à construire sa maison, lorsque j'aide ma famille dans les champs, lorsque je suis investi bénévolement dans des activités, j'estime que je travaille, quand bien-même ce travail n'est pas rémunéré.
Quant au "travailler plus", pouah! quelle horreur!
Je suis d'accord de travailler plus dans des domaines non professionnels (comme ceux décrits ci-dessus), mais j'aimerais que ce soit enfin reconnu comme du travail. D'autre part, "travailler plus" pour mon entreprise nuira au lien social que le bénévolat me permet de développer...
Alors merci, non, merci... la "valeur" travail, comme on dit beaucoup dans les deux camps, ne passe pas d'abord par une valeur économique, mais par une reconnaissance (qui peut inclure l'économie, mais l'économie n'en est pas le but) du travail déjà accompli...