Né à Paris, le professeur et théologien protestant baptiste français Jean-Marcel Vincent a tiré sa révérence à Bochum (Allemagne), le 17 décembre 2022, à l'âge de 77 ans.
Il est issu de la "dynastie" baptiste des Vincent, qui a constitué, à certains égards, la colonne vertébrale de la Fédération Baptiste (FEEBF) durant plusieurs décennies.
Croisant théologie, recherche, pastorat, enseignement, il a tracé un itinéraire singulier et laissé un héritage savant, se jouant des catégories confortables.
Jean-Marcel Vincent a notamment été le pasteur des Eglises baptistes de Lens (Pas-de-Calais) et de Béthune de juillet 1974 à juillet 1980.
Passeur de frontières, il a aussi enseigné à Bangui (République Centrafricaine), effectué de nombreuses conférences en France et à l'étranger (jusqu'au Rwanda). Jusqu'à sa retraite académique, il a été professeur de sciences bibliques (Ancien Testament) à la Faculté Libre de Théologie Protestante de Paris, Bd Arago.
Titulaire d'un doctorat et d'une habilitation de la Ruhr-Universität (Bochum, Allemagne), ses recherches universitaires les plus significatives portent sur le théologien français Édouard Reuss (1804-1891), sur lequel il publie la monographie Leben und Werk des frühen Eduard Reuss (1990), à partir de sa thèse de doctorat en théologie soutenue à l’université de Bochum (Allemagne).
Il se penche sur la jeunesse et la formation d’Édouard Reuss jusqu’en 1842, année où Reuss publie son premier ouvrage marquant, Geschichte der heiligen Schriften Neuen Testaments. Jean-Marcel Vincent décortique les influences philosophiques, politiques et théologiques qui ont façonné la pensée du théologien strasbourgeois, tout en pointant aussi son originalité.
Féru, à ses heures, d'histoire du protestantisme et des Eglises baptistes en particulier, il fut, entre autres engagements, un soutien fidèle de la Société d'Histoire et de Documentation Baptistes de France (SHDBF) créée en 2000, dont il a été un des membres du conseil d'administration.
Jean-Marcel Vincent nous a laissé de nombreuses publications de référence.
Sur l'éthique et l'exégèse biblique, on retiendra notamment les articles suivants :
-"La cohérence du livre de Michée et de son discours sur l’autorité", Hokhma, n°72, mai 2004,
-« Tu aimeras ton prochain comme toi-même » ? Lv 19,18b dans son contexte", Études Théologiques et Religieuses , tome 81, 2006/1,
-"L’impact de la chute de Jérusalem sur la littérature biblique. Quelques éléments de réflexion", Hokhma n°90, juin 2006,
-"Une confession singulière : «le Seigneur est Un», Études Théologiques et Religieuses, tome 88, 2013/2,
-et un numéro spécial Hors Série 2022 de la revue Etudes Théologiques et Religieuses intitulé : "Un combat pour le progrès des sciences bibliques en France. La correspondance Michel Nicolas – Édouard Reuss (1834-1886)".
Le catalogue de la revue savante ETR ne compte pas moins de onze contributions signées Jean-Marcel Vincent.
Ne dédaignant pas l'histoire, il nous a également laissé les trois articles suivants :
-"Un forage dans l’histoire de «l’Égypte noire» : l’œuvre baptiste à Lens en 1885", Bulletin de la SHDBF, n°2, dossier Visages du baptisme, 2014,
-"L'influence de l'«École de Paris» sur le pasteur baptiste Philémon Vincent (1860-1929)", Bulletin de la Société de l'Histoire du Protestantisme Français, Vol. 160 (Avril-Mai-Juin 2014), pp. 633-664, et
-"Les premiers missionnaires de la FEEBF (1920-1930)" , Bulletin de la SHDBF, n°7, dossier Baptisme et mission, juin 2022.
D'autres contributions et enseignements mériteraient d'être catalogués (Revue Biblique, Etudes Renaniennes, Revue d'Histoire et de Philosophie Religieuse etc.).
Celles et ceux qui ont eu le privilège de le connaître se souviennent d'un homme d'une élégance intellectuelle rare, alliant qualité d'écoute, profondeur, érudition, bienveillance et (grande) modestie.
Aux réflexes de fermeture qui hantent parfois certaines chapelles, il préférait la recherche, le dialogue et la liberté.
Merci Jean-Marcel.
Commentaires
J'ai connu Jean Vincent quand il était dans le Pas de Calais. Un homme érudit et sans aucun orgueil, sans condescendance. Une "perle"que beaucoup n'ont pas su apprécier.. Et puis il a quitté la région et on s'est perdus de vue.. Une rencontre il y a quelques années au Musée du Désert..Je regrette profondément de ne plus l'avoir côtoyé..Un sage..