Le Gabon est un pays d'Afrique équatoriale, particulièrement étudié sous l'angle religieux par mon collègue le professeur Joseph Tonda, spécialiste en matière d'étude des groupes protestants, néoprotestants, évangéliques, pentecôtistes & charismatiques.
Ce n'est pas le premier pays auquel on pense lorsqu'on évoque la francophonie protestante, sans doute en raison de sa faible démographie (1,6 million d'habitants seulement), liée aux rudesses d'un climat équatorial "pur" (pluie tous les jours, air saturé d'humidité).
Pourtant, si sa population est six fois inférieure à celle de la Belgique, sa superficie est huit fois plus importante (267,667km2) et ses très riches ressources naturelles (convoitées par la "Françafrique") en font un pays clef, dans un contexte politique assez tourmenté.
Environ 13% de protestants évangéliques en 2012
En matière religieuse, c'est également un pays d'une grande vitalité, qui comporte 40% environ de catholiques (une présence initiée par Jean-Rémi Bessieux, implanteur du catholicisme au Gabon en 1844), et 16% de protestants. Les évangéliques (gros bataillons de ce protestantisme) représentent environ 13% de la population en 2012 (ils pesaient 2% à la fin des années 1950).
C'est surtout dans les rangs de ces derniers que se sont développés, ces trente dernières années, de multiples formations musicales, dont beaucoup se retrouvent (comme au Cameroun) sous la bannière d'un genre "Gospel francophone" pas encore bien stabilisé, loin s'en faut, mais en cours de structuration.
Toutes proportions gardées, le contexte du "marché" musical n'est pas sans rappeler celui du Cameroun (même si le PIB par habitant, au Gabon, est 7 fois supérieur à celui du Cameroun voisin): peu ou pas de soutien étatique, infrastructures et réseaux de diffusion ultra-précaires ... mais trésors de "débrouille" et effet dopant des nouvelles technologies numériques.
Carte du Gabon et des implantations évangéliques (missions Atlas Project)
Pour introduire cette scène musicale protestante gabonaise, Clarisse Mbina est aujourd'hui considérée au Gabon comme "une valeur sûre" de premier plan. Sa popularité actuelle s'est peu à peu dessinée au début des années 2000, et l'a notamment conduite à être choisie comme chanteuse principale à l'occasion d'une grande manifestation chrétienne à Pâques 2009, au stade omnisport Président Bongo dans la capitale Libreville.
Ses oeuvres sont principalement diffusées sur les radios chrétiennes locales (très nombreuses), comme FM Mbire, RTN, Shekina, Bethel Media. A partir de 2006-07, elle occuperait "les meilleures ventes d’album Gospel", ce qui reste néanmoins modeste (en matière de marché intérieur, le Gabon n'est ni le Congo, ni le Cameroun), avec quelques milliers d'exemplaires vendus.
Plusieurs fois présentée ces dernières années sur le site internet GabonHits, elle y apparaît comme une chrétienne très pratiquante et prosélyte, portée sur des valeurs plutôt "sages" et consensuelles, et un style jugé "classique" (point de message infrapolitique à chercher, contrairement à ce que l'on voit dans d'autres groupes -cf. prochaine note-).
Le vidéoclip ci-dessous, qui dévoile une chanson de son premier album, confirme cette veine, sur la base d'une mélodie francophone (bien que Clarisse Mbina chante aussi en punu, langue du Sud du Gabon) fondée sur refrain et répons autour du thème (central pour les protestants) de la Grâce Seule (Sola Gratia).
Clarisse MBINA, "chantre de l'Eternel", titre "C'est par grâce", issu de son premier album
(9155 visionnages sur Youtube à dater du 5 février 2012 au matin)