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Quand Pierre Loti pleurait la "franquisation" des "pures Egyptiennes"

egypte,coptes,chrétiens d'orient,orientalisme,pierre loti,le caire,église saint serge (le caire),vieux caireAvec un parlement à 70% islamiste, l'Egypte d'aujourd'hui prend ses distances avec le référentiel européen.

Les Egyptiennes croisées dans la rue du Caire ces jours-ci sont certes loin d'être toutes passées au voile intégral, et donnent à voir une formidable variété de tenues, y compris de nouveaux foulards crêpés ma fois fort charmants, qui font penser, de loin, aux coiffures style choucroute des années 60. Mais en Europe, on s'inquiète.

Ah, le bon vieux temps de l'influence occidentale!

 

En guise de clin d'oeil, l'historien fera observer qu'on n'a pas toujours raisonné ainsi. Vu d'Europe, Pierre Loti (1850-1923) se lamentait même... des progrès des "robes et chapeaux" chez les "pures Egyptiennes" coptes d'antan.

Les amateurs d'orientalisme apprécieront ces descriptions, qui nous ramènent dans le quartier du Vieux Caire copte et de l'Eglise Saint Serge.

"La naïve église de Saint Sergius est une relique très cachée, presque enfouie au milieu d'un dédale de ruines; sans un guide, rien n'est plus difficile que de s'orienter pour la découvrir. Le quartier qui la contient s'enferme dans les murs de ce qui fut jadis une citadelle romaine, et cette citadelle à son tour s'enveloppe des tranquilles désuétudes du "Vieux Caire", qui est au Caire des mameluks et des khédives un peu ce que Versailles est à Paris. Ce matin de Pâques, partis en voiture du Caire actuel pour nous rendre à cette messe, nous avons à traverser d'abord une banlieue en voie de transformation, où du sol antique vont bientôt sortir quantité de ces modernes horreurs en fonte et en torchis, usines et grands hotels, qui pullulent dans ce pauvre pays avec une stupéfiante vitesse. (...) Arrivés aux murailles de ce qui fut la citadelle romaine, il faut descendre de voiture, franchir une porte basse et pénétrer à pied dans le labyrinthe d'un quartier copte qui se meurt de poussière et de vétusté. Maisons délaissées, servant de refuge à des miséreux; moucharabiehs qui tombent en vermoulure; ruelles en souricière, qui parfois nous font passer sous quelque arceau du Moyen-Âge (...)

Et c'est cela, le chemin qui conduit à une basilique fameuse? Nous croirions nous être égarés, n'étaient ces groupes de Coptes en tenue du dimanche qui se rendent comme nous à la messe pascale à travers les ruines. Et qu'il y en a de jolies, de ces femmes drapées en fantômes dans des soies noires! Leur long voile ne les cache point comme celui des musulmanes; il est seulement posé sur leurs cheveux et découvre leur fin visage, leur collier d'or, leurs bras un peu nus qui portent au poignet de grosses torsades en or vierge. Pures Egyptiennes, elles ont gardé ce même profil délicat et ces mêmes yeux si allongés qu'avaient les déesses de jadis, inscrites en bas-relief sur les murs pharaoniques. Mais déjà quelques-unes, hélas ! parmi les jeunes, ont renié le traditionnel costume pour s'habiller à la franque, porter robe et chapeau." 

Pierre Loti, extrait tiré de Jean-Claude Berchet, Le voyage en Orient, Anthologie des voyageurs français dans le Levant au XIXe siècle, Paris, Robert Laffont, 1985, p.1006-1007

p.1006-1007)

Commentaires

  • Cher SF
    Cf les femmes du Caire Gérard de Nerval Voyage en Orient p.145 folio classique
    la lecture est savoureuse

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