A l'image d'André Encrevé qu'elle connaît si bien, l'historienne Marianne Carbonnier-Burkard n'est pas de ces plumes ou de ces voix qui se taisent dès la retraite administrative venue.
Mais ce n'est pas une raison pour oublier de saluer comme il se doit sa "leçon d'adieu", donnée le 15 mai dernier (2012) à la Faculté de Théologie Protestante de Paris (IPT), sur le sujet suivant: Alphabet du salut par la foi: une liaison dangereuse dans la France du XVIe siècle (texte intégral ici).
Leçon d'adieu, vraiment?
Historienne reconnue pour son expertise en matière de protestantisme moderne (XVIe et XVIIe siècle en particulier), Marianne Carbonnier-Burkard a été de tous les combats, au cours des trente dernières années, au service de l'historiographie du protestantisme français, apportant une contribution signalée, au-delà de cet horizon, à la recherche française en histoire des religions.
On n'imagine pas que sa "leçon d'adieu" (2012) soit autre chose qu'un au-revoir.
Adieu, sans doute, à un poste de titulaire, le temps de la retraite administrative venue. Mais simple au-revoir à la recherche et à l'écriture, que Marianne Carbonnier-Burkard, gageons-le, continuera à servir avec le talent et la passion qu'on lui connaît.
IPT, GRHP, Musée du Désert et toujours une même vocation
"Coordinatrice" (le mot est faible) du Groupe de recherches d'histoire des protestantismes, associant l’IPT-Paris, le LEM (EPHE-CNRS : UFR 8584) et l’Institut J.-B. Say (UPEC), deux fois doyenne de la Faculté de Théologie Protestante (IPT) en 2000-2002 et 2005-2007, elle est aussi, entre autres responsabilités, conservateur adjoint du Musée du Désert, principal lieu de mémoire du protestantisme français, au Mas Soubeyran (Cévennes), où se tient chaque année la fameuse Assemblée du Désert (premier dimanche de septembre).
C'est à ce titre qu'avec une efficacité discrète qui n'a d'égale que son flair à repérer les talents, elle contribue fidèlement à renouveler, d'année en année, l'éventail des oratrices et orateurs qui se succèdent, lors de cette Assemblée, pour nourrir, tels des relais de flamme olympique, la longue chaîne qui retrace chaque année au Désert, tantôt par la mémoire, tantôt par les sciences sociales, l'itinéraire protestant français depuis le XVIe siècle.
Non contente de multiples responsabilités collectives et d'un apport scientifique considérable sur l'anthropologie historique du protestantisme à l'époque moderne (le contemporéaniste que je suis n'est pas assez compétent pour l'apprécier à sa juste valeur), Marianne Carbonnier Burkard est une enseignante et une collègue qui valorise les autres.
Je ne suis pas prêt d'oublier avec quel panache elle avait dit au-revoir, sans notes et sourire aux lèvres, à Michelle MAGDELAINE (CNRS), voici plus de dix ans, alors que j'étais encore un très jeune chercheur. Auteure d'une base de donnée sur le Refuge huguenot, cette dernière prenait alors sa retraite, et Marianne Carbonnier Burkard avait su, dans son hommage, aller bien au-delà des mots convenus, démontrant une oblativité chaleureuse qui contraste avec sa grande retenue dès qu'il s'agit de parler d'elle.
Se souvenant du plaisir qu'elle a souvent montré à retracer l'itinéraire d'un(e) collègue, Marianne me pardonnera ce bref portrait si incomplet, tout petit jalon sur une route qui se poursuit, car plus que par une "carrière" (qui a un début et une fin réglementaire), Marianne est portée par une "vocation" d'historienne. Et qui peut dire jusqu'où la vocation nous mène?