On ne le dira jamais assez: l'hebdomadaire Réforme n'est pas seulement un journal protestant francophone de référence.
C'est aussi "un regard protestant" sur l'actualité, qui traite donc de tout, ou presque!
Une nouvelle preuve cette semaine avec une intéressante enquête de Iulia Badéa Guéritée (de Presseurop.eu) sur un aspect souvent peu étudié: le poids économique et social de certaines Églises orthodoxes.
En page 4 de l'hebdomadaire (n°3442, ed. du 1er décembre 2011), sous le titre "l'Eglise impassible", la journaliste rappelle les liens économiques et financiers qui rapprochent l'Église orthodoxe roumaine de l'État roumain, et l'Église orthodoxe grecque de l'État grec.
Ainsi, "l'Église orghodoxe en Roumanie a engrangé 10 millions d'euros de bénéfices en 2010 et le tout sans impôts, ni retenue d'aucune sorte". En Grèce, l'Église orthodoxe est quant à elle "le premier promoteur immobilier du pays... Et libre de toute taxe !" On connaissait depuis longtemps les multiples dérapages affairistes des moines du Mont Athos...
Autisme social?
Cette enquête jette une nouvelle lumière sur une Église orthodoxe soupçonnée par Cristian Ghinea (directeur du centre roumain de politique seuropéennes" d'"autisme social" (ciré dans Réforme). L'accusation est certainement très excessive: l'Église grecque, par exemple, s'illustre depuis de nombreuses années par ses distributions massives de repas chauds gratuits à destination des sans-ressources.
On observe la même chose dans les rues de Moscou ou de toutes les grandes villes russes. Mais au-delà de ces oeuvres de "charité", certes précieuses pour celles et ceux qui en bénéficient, quid des contributions plus larges à la redistribution solidaire? C'est la question qui est posée dans cette enquête d'Iulia Badea Guéritée.
Il est d'usage, dans les médias, de critiquer chez certains néoprotestants la "théologie de la prospérité" et ses dérives ou surenchères. Et du point de vue d'une éthique de responsabilité, il y a de bonnes raisons de le faire, en tout cas lorsque la visée la plus évidente est avant tout l'enrichissement.... de certains prédicateurs.
"Pope art" (publié dans Technikart nov. 2011, p.24)
Mais il n'est peut-être pas inutile de rappeler qu'il y a bien d'autres relations équivoques entre richesse et foi, y compris derrière le manteau (c'est-à-dire bien moins voyantes qu'un certain télévangélisme nouvelle vague), et dans des Églises souvent vantées (d'ailleurs à juste titre) pour leur tradition mystique....
Pour prolonger la réflexion, outre ce clin d'oeil ci-dessus (second degré!) à l'art contemporain, avec cette création hybride entre Darth Vador et un pope orthodoxe (publiée dans l'édition de Technikart de novembre 2011, p.24), on lira ou relira avec intérêt, pour découvrir un autre "terrain" orthodoxe" (russe): Jean-François Colossimo, L'apocalypse russe, Dieu au pays de Dostoïevski, Paris, Fayard, 2008.
Commentaires
M. Fath, vous en dites trop ou pas assez, c'est un peu dommage ; sur le fond je suis d'accord avec vous (qui peut être contre ? ), mais, à part ça ? Il existe des relations équivoques entre la pauvreté et la foi, aussi...
Je ne connais pas beaucoup les églises orthodoxes, j'ai, comme vous semble-t-il, entendu parler d'abus financiers en grèce, c'est tout. Cela existe aussi pour les églises évangéliques françaises : j'entends quelques fois parler de financements américains, vous savez aussi, je crois :-)
Il me semble que concernant l'argent les risques de dérives dans les milieux évangéliques sont du même mécanisme que les dérives d'ordre sectaire : leur conception de l'église, engagée dans la vérité au milieu d'un monde en perdition, leur donne des allures de "on a toujours raison du moment qu'on se réfère à dieu".
Sur l'argent un autre principe me parait très dangereux : celui de la dîme, souvent exprimé sous la forme d'une règle venant du seigneur (puisque c'est écrit quelque part dans la bible).
Il y a heureusement des adaptations d'ordres humains ; je n'ai jamais vu d'abus concrets dans ce domaine. Mais le principe est dangereux.
Espérons que les hommes restent sages devant les principes. Que l'on oublie pas que "Le sabbat est fait pour l'homme, et non l'homme pour le sabbat". C'est pareil pour l'église.
Cordialement.
A propos de la question de la "dîme", qui est évoquée par ista dans son commentaire du 05.12.2011, on trouvera des informations détaillées, argumentées et intéressantes dans l'article suivant paru au 3ème trimestre 2005 :
http://www.promesses.org/arts/153p18-20f.html
qui est tiré de "Promesses" : c'est une revue de réflexion biblique trimestrielle qui paraît depuis 1967 (Henri Lüscher, éditeur).
Je vous recommande aussi à titre indicatif dans la même revue l'article du 4ème trimestre 2009 de Jacques Blocher (1909-1986) sur le thème "Le chrétien et l'argent" : http://www.promesses.org/arts/170p4.html