"L'abbé Serge ne reviendra pas". Sous ce titre, le quotidien picard L'Union décrivait, le 28 septembre 2011, la fin d'un sacerdoce africain en Thiérache (nord de l'Aisne).
Venu du Congo, l'abbé Serge aurait "le mal du pays"... Et après quatre ans en Picardie profonde, Serge Mbunsu, originaire de Kikwit (République démocratique du Congo), a décidé de prendre le large, sans projet de retour, laissant des paroissiens désemparés (répartis sur 38 communes).
En-dehors de considérations sur la solidité de sa vocation, des clichés éculés sur la "religion naturelle des Africains" (dixit le père Lapauw cité dans L'Aisne nouvelle, voir ci-dessous) et de réflexions un peu "bateau" sur le décalage des cultures, on découvre, au vu de la presse locale, que le conte de fée d'une Afrique qui régénère spirituellement l'Europe se heurte des résistances locales... manifestées ici par des menaces et des insultes racistes proférées, semble-t-il, par des intégristes catholiques.
Au-delà du cas particulier de ce contexte thiérachien, c'est tout l'écart entre une société profondément sécularisée comme la France, et une société beaucoup plus religieuse (au Congo) qui se pose.
Le dieu moribond des Blancs ?
Un écart qu'avait déjà souligné Gaston Kelman dans son livre manifeste, au titre provoquant: Les blancs m'ont refilé un Dieu moribond (2007). Histoire de souligner le fossé entre une Europe sceptique, apeurée à l'idée d'invoquer un Dieu vivant et puissant, et une Afrique fervente.
Pour documenter l'histoire singulière de cet abbé Serge, Congolais en mission en Thiérache, on trouvera ci-dessous deux articles scannés, issus de la presse locale (L'Union et L'Aisne Nouvelle).
"L'abbé Serge ne reviendra pas" (L'Union du 28 septembre 2011)
"Menacé, le curé s'envole pour d'autres cieux" (L'Aisne nouvelle, 29 septembre 2011)
Pour contextualiser cette histoire singulière, rappelons par exemple que dès 2002, l'excellent site d'information online Afrik.com publiait une petite étude consacrée à "La France, terre d'accueil pour les prêtres africains".
Six ans plus tard (ci-contre), Jean Mpisi publiait Prêtres africains en Occident (Paris, L'Harmattan, 2008). Ce livre constitue moins une synthèse qu'une réflexion sur les enjeux posés par la "mission inversée" impulsée depuis Vatican II par le fameux décret Ad Gentes (qui permet les "dons de foi" du Sud vers le Nord, au travers de l'envoi temporaire de prêtres diocésains africains au sein des églises européennes).
Un Congolais dans la "brousse" normande
Un an plus stard, le magazine Vingt-et-un (XXI) proposait, en 2009, un formidable dossier intitulé "Bleu Blanc Noir", "Quand les Africains prennent racine en France", comportant notamment une sorte de "journal de terrain" d'un prêtre africain dans le bocage normand.
Dans ce texte intitulé "Le crayon de Dieu n'a pas de gomme", on découvre les souvenirs et les expériences d'un "missionnaire" singulier dans la "brousse" de Normandie, le père Borice Mokélé, né sur les rives du fleuve Congo (p.32 à à 41).
Notons enfin, pour compléter cet aperçu (incomplet) de quelques références bibliographiques sur les enjeux croisés des catholicismes franco-africains dans l'hexagone, la très éclairante étude de Brigitte Bleuzen sur les catholiques africains en banlieue parisienne (ASSR n°143).
"Christianismes du Sud à l'épreuve de l'Europe" (ASSR)
Intitulé "Africains en paroisses de banlieues", cet article a été publié dans un remarquable numéro thématique des Archives de Sciences Sociales des Religions ("Christianismes du Sud à l'épreuve de l'Europe", numéro ASSR 143 coordonné par André Mary, juillet-septembre 2008).
L'article de Brigitte Bleuzen peut y être consulté aux pages 215 à 234, mais au-delà, tout le numéro thématique, fondé sur le "croisement des regards du dedans et du dehors", est passionnant: une véritable référence et un instrument de travail incontournable en sciences sociales.
Last but not least, faut-il préciser que ces considérations sur les enjeux catholiques des flux Afrique-Europe invitent à des études croisées avec le protestantisme?
Commentaires
Je suis chrétien, protestant évangélique, blanc, français de l'hexagone (je n'aime pas le terme de "métropole" avec sa connotation post coloniale d'avant 1946) d'origine napolitaine du côté maternel, parisien et marseillais d'origine du côté paternel, et marié avec une noire martiniquaise sang pour sang. Je vis en Martinique désormais et honnêtement je n'ai plus envie de revenir dans l’exsangue aune. Les clichés de cet acabit, tels qu'expliqués dans cet article, véhiculés et débités en grande quantité à longueur de journée en France hexagonale, j'en ai tellement entendu depuis de nombreuses années que, si on les mettait en orbite, ce serait l'éclipse permanente et totale ici-bas, c'est dire... Entre la décadence morale, la perte de repères identitaires toutes catégories confondues, la tentation des extrêmes et du communautarisme, le manque de compréhension réciproque et la montée des tensions sociales de toute nature (ce qui n'est jamais bon, dans tous les cas de figures), l'ignorance et la bêtise grandissantes diffusées avec la complicité quasi-unanime d'émissions de télévision abrutissantes et d'un vide intellectuel abyssal, la désinformation assourdissante, la déchristianisation d'une société en proie à ses nostalgies révolutionnaires mal digérées, le concept d'une laïcité républicaine mal comprise, mal expliquée et souvent mal illustrée, et pour conclure la pauvreté d'un simulacre de débat politique binaire... Il ne faut pas s'étonner face à ce type de fait. Ceci dit, je connais des frères chrétiens qui se sont très bien adaptés à la vie dans l'hexagone, mais les temps actuels ne sont pas porteurs, hélas.
mesdames, messieurs, nous avons connu l'abbé serge qui a baptisé notre petite fille et communion notre fils. c'est pourtant un homme d'une très grande gentillesse comparé à certaines personnes. il a toujours répondu présent et c'est vraiment dommage qu'il soit reparti mais surement qu'il doit être mieux acceuilli dans son pays malgrès la dureté de celui ci. et j'espère du fond du coeur que nous même on puisse le voir.
Bonjour à tous,
C’est un plaisir pour moi d’avoir connu ce site et je profite de l’opportunité qui m’est offerte pour faire savoir à tous les lecteurs ma préoccupation.
Je suis un jeune entrepreneur en Afrique de l’ouest et j’ai pleins de projets à développer mais faute de moyens financier, aucun de mes projets n’a vu le jour.
En ce début d’année 2012 je souhaite à tous les lecteurs de ce site une année de réussite, santé et de longévité.
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Mr Fabrice