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Déjouer les pièges de la 'sociologie' de la déploration

sciences sociales, sciences sociales des religions, méthodologie, épistémologie, sciences humaines, christophe guilluy, no society, sociologie de la déploration, idéologie, études décoloniales, études postcoloniales, intellectuelsDans la cabale qui a dénoncé récemment, en France, les études décoloniales et postcoloniales, j'ai pris position pour défendre la légitimité de ces dernières. Le décentrement intellectuel est une exigence, s'y dérober est une erreur.

Les problèmes soulevés étaient par ailleurs mal posés. En effet, les dérives dénoncées, de manière généralisante, étaient englobées avec un cadre d'étude et d'analyse. Alors que c'est d'une méthodologie Et d'une épistémologie déficientes qu'il faut plutôt s'inquiéter, au lieu d'invalider en bloc le cadre d'analyse postcolonial ou décolonial, dont nous avons besoin pour mieux penser notre temps.

Un texte remarquable (lien), fruit d'une enquête publiée en anglais par James A.Lindsay, Peter Boghossian et Helen Pluckrose, nous propose cette critique épistémologique et méthodologique. Il situe mieux les enjeux que l'appel très maladroit de quelques dizaines d'intellectuels contre le "décolonialisme" (sic).

L'enquête conduite par ces chercheurs (lien) pointe le risque mortel pour les sciences humaines, que la déploration idéologique remplace l'exigence d'explication rigoureuse de la réalité sociale. Quand on tombe dans cette 'sociologie' de la déploration (academic grievance), idéologisée et victimaire, quel que soit le cadre d'étude (qu'il soit décolonial, colonial etc), on sort des sciences sociales.

Et le problème se pose dans certains milieux académiques états-uniens (revues, campus), comme en France. Christophe Guilluy l'évoque dans son bel essai roboratif, No Society, dans lequel il invite bon nombre d'intellectuels à sortir d'une hémiplégie victimaire (surfocalisation idéologisée sur certains sujets à la mode) pour retrouver une démarche plus distanciée, plus objectivée, et plus digne de ce que devraient être les sciences sociales. Gage d'un regard moins déformé sur la réalité sociale que nous vivons.

Lien.

MAJ : je remercie vivement Pamela Millet-Mouity de m'avoir signalé cette réponse apportée par un journaliste, Daniel Engber. Elle a été traduite en français pour le site slate (lien) et mérite d'être versée au dossier.

Ce texte journalistique formule certaines critiques de manière très juste, mais il est aussi inégal, et biaisé. Il fait aux auteurs d'AERO un mauvais procès d'intention contre les #GenderStudies dans leur globalité (alors que le sujet, ce n'est pas cela). Ce procédé de délégitimation n'a rien de scientifique.

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