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Pratiquants: chrétiens à l'UMP, musulmans au PS? (Présidentielles 2012)

élections présidentielles,électorat musulman,électorat catholique,france,république,nicolas sarkozy,françois hollande,réforme,ifop,jean-paul willaime,sondage,électorat protestant,électorat évangéliqueIl y a quelques semaines, l'hebdomadaire Réforme (n° 3458 du 29 mars 2012) a proposé une intéressante enquête sur le vote protestant, basée sur un sondage IFOP réalisé du 9 janvier au 23 mars 2012, sur un petit échantillon de 410 protestants. Cette enquête a déjà été commentée dans ce blog (note du 30 mars 2012).

Cette enquête montrait que les protestants seraient aujourd'hui plus à droite que la moyenne des Français, ce qui confirme des données précédentes. La raison? Jean-Paul Willaime, qui analyse très finement les données, en proposait deux.

La première est liée à un facteur régional, le "Grand Est" (marqué par une forte présence protestante) se montrant structurellement plus conservateur.

La seconde est liée à un facteur confessionnel, les protestants de tendance évangéliques déclarant voter à 70% en faveur de Nicolas Sarkozy, ce qui contribue aussi à relever le total protestant de droite.

 

Compléments d'analyse

Ces conclusions sont imparables. Dans la blognote du 30 mars, j'ajoutais un complément concernant le caractère... possiblement conservateur de l'offre politique socialiste. J'en ajouterai ici deux autres, dans le contexte post-électoral de la nouvelle présidence Hollande.

Le premier complément est qu'un autre facteur régional, plus ténu, serait peut-être à prendre en compte, à savoir le "Grand Sud" , structurellement plus à droite (on l'a vu dans la cartographie des votes du second tour des Présidentielles).... Ce Grand Sud marqué aussi, quoiqu'à un moindre degré, par une forte présence protestante, ce qui peut jouer.

Le second complément est d'ordre explicatif, en ce qui concerne mon terrain d'étude, à savoir l'évangélisme. Plusieurs autres enquêtes, ces dernières années, ont montré que les évangéliques ne sont que marginalement plus conservateurs, politiquement, que les autres protestants.

élections présidentielles,électorat musulman,électorat catholique,france,république,nicolas sarkozy,françois hollande,réforme,ifop,jean-paul willaime,sondage,électorat protestant,électorat évangéliqueDans La nouvelle France protestante (2011), sur la base d'autres données IFOP, Jean-Paul Willaime pointait par exemple que les "luthéro-réformés" montraient un "total gauche" de 53%, contre 46% pour les évangéliques. Il y a un écart, mais il n'est pas très grand. Jean-Paul Willaime soulignait alors que "l'opposition couramment faite entre un réformé de gauche et un évangélique de droite ne correspond pas à la réalité" (Nouvelle France Protestante, p.419).

Or, lors des Présidentielles 2012, les évangéliques se seraient droitisés plus nettement. Pourquoi?

a/ Une hypothèse pourrait tenir à la personnalité du candidat socialiste. Très attachés à l'éthique de conviction, les évangéliques se seraient montrés particulièrement méfiants vis-à-vis d'un homme suspecté de double discours, et impliqué depuis longtemps dans les cuisines partisanes.

b/ Par ailleurs, les intentions revendiquées du candidat socialiste en matière de légalisation du mariage homosexuel et de l'adoption par des couples homosexuels aurait également refroidi plus d'un. Les évangéliques, en effet, se montrent, sur ces questions, très attachés à l'éthique familiale traditionnelle, quitte parfois à faire évoluer leur vote en fonction des positions défendues par les candidats.

c/ Enfin, François Hollande fait partie des socialistes qui se désintéressent de la religion (contrairement à Jean-Luc Mélenchon, pourtant plus à gauche). Or, les évangéliques valorisent l'expérience spirituelle et religieuse. Un candidat de gauche insensible à cette dimension les rebuterait davantage qu'un autre.

 

élections présidentielles,électorat musulman,électorat catholique,france,république,nicolas sarkozy,françois hollande,réforme,ifop,jean-paul willaime,sondage,électorat protestant,électorat évangéliqueVote catholique pratiquant similaire au vote évangélique

On remarquera que cette accentuation du vote évangélique en faveur de Nicolas Sarkozy se retrouve aussi, et même un peu davantage encore, du côté des pratiquants catholiques, puisque 79% des catholiques pratiquants interrogés ont voté pour Nicolas Sarkozy en 2012 selon un sondage Harris Interactive pour La Vie (publié le 7 mai 2012).

En revanche, on observe une symétrie inverse en ce qui concerne le vote musulman pratiquant, puisque une étude réalisée par l'institut de sondages Opinionway pour Le Figaro le jour du second tour des Présidentielles sur 10.000 votants révèle que 93% des musulmans pratiquants interrogés ont voté François Hollande.

S'il fallait conclure un peu rapidement, on pourrait dire ceci: le Parti Socialiste capte le vote musulman pratiquant, la Droite parlementaire capte le vote chrétien pratiquant.

Commentaires

  • > "…les protestants de tendance évangéliques déclarant voter à 70% en faveur de Nicolas Sarkozy…"
    > "…79% des catholiques pratiquants interrogés ont voté pour Nicolas Sarkozy en 2012…"

    L'exemple vient d'en haut. ;-)

    http://www.youtube.com/watch?v=hW3xQacNlBQ

    Témoin s'il en est du Ciel qui s'est acharné sur le nouveau président Hollande lors de son investiture, comme chacun sait : la flotte sur les Champs-Élysées, et surtout la foudre sur l'avion présidentiel (le genre de pépin dont on dirait "ça ne s'invente pas !" si l'info n'avait pas fait le tour du monde), etc.

    Bref, la preuve est faite: Dieu est de Droite. CQFD :-)

  • Pour un président censé ne pas se préoccuper « de religion », on remarque la présence d’anciens « jocistes » au sein du gouvernement Ayrault :

    « un signe fort à destination d’une jeunesse de milieux populaires qui se bat au quotidien face au chômage, aux précarités et aux discriminations », se félicite la Jeunesse Ouvrière Chrétienne (JOC) dans un communiqué (http://www.cnajep.asso.fr/actualites-des-membres/2012/communique-joc-le-nouveau-gouvernement-attise-les-espoirs-des-jeunes-de-milieux-populaires.html )
    Celle-ci « salue les nominations de Valérie Fourneyron au ministère chargé de la Jeunesse et de l’Education Populaire et de Cécile Duflot à l’Egalité des territoires et au logement ainsi que la nomination de deux anciens jocistes au gouvernement".

    On remarquera en effet six nouveaux postes de ministres consacrés aux questions de solidarité : Economie sociale et solidaire, handicap, développement, droit des femmes, personnes âgées, logement...

    Doit-on « opposer » des protestants et des catholiques « plus à gauche », qui, sans nécessairement avoir le nom de Dieu à la bouche, démontrent dans l’action qu’ils respectent l’esprit de l’évangile, et des évangéliques, qui, revendiquant la défense d’une « identité chrétienne », se montrent plus sensibles à certains thèmes d’éthique, mais négligeant les thématiques de la solidarité, de l’environnement et du social ?

  • Que vaut enfin une telle enquête faite sur un si petit échantillon ?(seulement 410 protestants, alors qu'un sondage nécessite entre 700-1000 personnes)

  • Cher Nic,
    Je partage vos réserves concernant la faiblesse de l'échantillon. En effet, attention à ne pas tirer des conclusions trop lourdes sur un si petit échantillon.
    Concernant votre post précédent, je partage aussi votre souci de ne pas tomber dans des oppositions caricaturales.
    En ce qui concerne les catholiques pratiquants, notons par exemple que leur profil électoral est loin de s'opposer aux évangéliques puisqu'au contraire, il lui est très proche. Les catholiques pratiquants semblent même se montrer plus à droite que les évangéliques pratiquants, en tout cas lors de cette élection 2012.

  • Bonjour,

    Il me semble que le virage à droite des protestants ne date pas de cette élection, mais de la précédente, en 2007. Du coup la personnalité de M. Hollande seraient à rapporter à celle de Mme Royal, je pense que je présume ?

    L'événement de ces élections est l'apparition d'un vote extrême droite - heureusement minoritaire - chez les évangélico-protestants. Encore une question de personnalité sans doute, celle de Mme Le Pen.

    Et puis à ces élections il semble qu'il y ait l'apparition d'un "vote musulman" - même si l'expression est difficile. La faute à M. Sarkozy, je pense. Je suis très perplexe car, pendant des années, M. Sarkozy a eu une politique qui se tenait par rapport aux musulmans. Je ne comprends pas pourquoi il a tout sabordé en quelques jours de campagne pour quelques lentilles ??

    Les français sont complètement à la ramasse avec les musulmans, s'imaginant qu'ils les envahissent avec le hallal. Économiquement parlant, dynamiquement parlant, les musulmans sont déjà parmi ceux qui comptent. Qui plus est, en rapport avec des pays tels la turquie, le maroc, l'algérie, pays en croissance. Pourquoi décréter la croissance, alors que nous ne savons même pas la chercher là où elle est ? Et même un pays comme l'égypte ; pourquoi va-t-on se battre en Chine, alors que l'Egypte est un immense potentiel humain, bien plus à la mesure des capacités économico-politiques françaises ?

    Question de personnalités, non ?...

  • Bonjour,

    Je reste songeur par rapport aux trois points proposés dans votre complément d'analyse.

    Peu de choses à dire sur le b/ comme raison majeure sinon que, comme vous le dites, nombre d'évangéliques seront capables en effet d'évaluer un programme politique (ou de baser leur vote) sur ces deux seuls points. Certainement limité, mais sans doute bien réel.

    Pour le a/ je suis déjà plus gêné. D'une part, sans donner dans le "tous pourris", les éventuelles suspicions mentionnées à l'encontre du candidat du Parti Socialiste pourraient certainement s'apposer à d'autres candidat(e)s à cette élection. À moins de conclure à un déficit de discernement quasi-abyssal chez les électeurs dits évangéliques.

    Maintenant, il serait peut-être aussi intéressant d'envisager un point d/ qui évaluerait le positionnement socio-économique (et/ou son évolution sur les 30 dernières années) des votants évangéliques et de leurs principales influences, avec comme corollaire leur(s) relation(s) au pouvoir (pris ici dans un sens éthique ou structurel)

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