Le débat sur la "religion des droits de l'homme" (cf. ouvrage de V.Zuber) renvoie à des enjeux qui dépassent l'histoire et la sociologie. La philosophie, l'éthique apportent un éclairage nécessaire, à l'image des travaux du philosophe et intellectuel Olivier Abel, qui creuse depuis longtemps les problématiques du politique et du croire en les croisant avec la différence protestante, historiquement construite comme une contestation du "monopole (institutionnel) du vrai, du bien et du juste" (1).
La "tentation" est là, "de plus en plus visible", souligne le philosophe, de voir la démocratie "se prétendre la religion de l'Occident", au risque d'un unanimisme qui tue le débat, la différence, le différend.
Et Olivier Abel de conclure, dans ce texte ancien mais qui n'a pas pris une ride: "Française, européenne, ou occidentale, cette démocratie sacrée mérite un éclat de rire" (2).
Cet éclat de rire épistémologique est à la fois léger (il soulage) et profond (il nourrit l'analyse). Il appelle à développer la réflexion pluridisciplinaire sur le politique, la différence, le "vivre-ensemble", l'espace public.
Quitte à démythologiser les grands discours, soit-disant laïques, sur une démocratie ou une République aux attributs quasi divins.
L'oeuvre féconde d'Olivier Abel nous y invite. Professeur d'éthique et de philosophie depuis 30 ans, président du Conseil scientifique du Fonds Ricoeur dont il est à l'origine (lien), il est l'auteur de nombreuses publications (lien), dont il donne un aperçu via son site internet, très riche en contenu.
Ce site permet une découverte progressive au gré des entrées thématiques, parmi lesquelles "Les cultures et le différend", où l'on retrouve de nombreuses pistes de réflexions sur les rapports entre politique, sacralité, protestantisme et laïcité (lien).
(1) Olivier Abel, "L'éthique protestante et l'esprit de la démocratie", in Richard Figuier (dir), Dieux en société, Paris, Autrement, 1992, p.116.
(2) Olivier Abel, "L'éthique protestante et l'esprit de la démocratie", ibid., p.122.