La construction européenne a été marquée, dès les années 1950, par une tension entre deux logiques. Une logique centralisatrice, technocratique et fort peu démocratique (celle qui l'a emporté), et une logique marquée par le principe de subsidiarité, qui signifie: traiter politiquement les questions au plus près des problèmes. Ne pas faire trancher à Bruxelles ce qui peut l'être à Noyon.
Au sujet de cette décevante Europe dominée par le triomphe d'un modèle d'autorité top-down, Michel Rocard déclarait, en novembre 2015: "l'Europe c'est fini, on a raté le coche" (lien).
Ne soyons pas sévères avec les Britanniques, qui viennent de trancher pour le BREXIT. Il y a certes une part d'égoïsme dans leur démarche, mais aussi une saine manifestation démocratique d'un rejet de cette Europe top-down qui a échoué et perdu sa légitimité populaire. L'Europe n'est pas morte. En rejetant l'Europe bruxelloise actuelle et ses clergés technocratiques, les Britanniques invitent même plus que jamais leurs amis européens à refonder un "vivre-ensemble" marqué par moins d'obésité institutionnelle, plus de respect de la volonté des citoyennes et citoyens, et une capacité de décision renforcée car plus légitime.
Commentaires
Si si, on peut "être sévère" avec un peuple qui a puisé ses principaux arguments dans le populisme, dans la prétendue courbure des bananes imposée par Bruxelles, etc., le tout non sans morgue et mépris pour les lamentables continentaux.
Que l'Europe, avec sa bureaucratie hypernormative, qui frise à la maladie mentale, soit sévèrement à critiquer, oui, mille fois. Mais qu'est-ce qui empêchait les britanniques d'être contributifs sur ce plan au lieu de sans cesse vouloir leur "money back"? Où est sa force critique de fond, pas de surface avec des intérêts corporatistes?
Dommage...
AncheK6
Merci pour cette analyse très juste, Sébastien. Que ta sagesse soit entendue par ceux qui nous gouvernent !
Oui, votre analyse me semble juste, cher Sébastien, et bienfaisante. Car dans les journaux radiophoniques ou télévisés, on n'entend que les mots "populismes", "jeu de l'extrême-droite" (on oublie un peu vite que les auteurs des violences actuelles en France sont plutôt d'extrême-gauche), refus d'accueillir des "migrants" etc.
Cette culpabilisation à outrance, destinée aussi à nous sermonner, nous Français pour tenter de décourager toute velléité de sortie de l'UE à notre tour !
Moi qui n'ai jamais été un européen convaincu (pour des raisons eschatologiques = Europe dont le drapeau comporte toujours 12 étoiles, la reconstitution de l'ancien empire romain voir prophétie de Daniel & Apocalypse, etc..., etc...), je ne suis pas surpris par le résultat du référendum britannique, et j'pense même qu'il y en aura d'autres qui suivront... En attendant, M. Michel Rocard a tout à fait bien résumé et il a simplement raison!!! Cette institution doit revoir son mode de fonctionnement et reprendre tout pratiquement à zéro, se doter de frontières réelles (contours des 27 Etats membres), avoir une gouvernance fait de ministres des 27, etc... Ou alors, il faudra revenir à la souveraineté nationale de chaque pays, sans quoi, ça va aller de pire en pire! Mais finalement est-ce que tout cela ne fait pas partie du plan de Dieu dans les temps de la fin que nous vivons...poser la question, c'est y répondre!!!
A Paris, le 8 mars 2001, Jacques Delors m'avait écrit dans une lettre soutenant [mon] projet de création d’un espace culturel européen entretenant la mémoire multi-religieuse, et baptisé EURO-SPI :
"[...Votre] projet s’inscrit tout à fait dans la ligne que j’avais en tête, lorsque j’étais président de la Commission, en lançant l’appel à « donner une âme à l’Europe ». Pour moi, cette « âme », nécessaire pour créer un lien spirituel entre les citoyens et une Europe trop souvent perçue comme technocratique, doit trouver son fondement dans la culture vivante de notre héritage spirituel dans toute sa diversité. [...] Je vous prie de croire, Cher Monsieur, à l’assurance de ma considération très distinguée."
Jacques Delors
Dommage... Un lobby d'intérêts locaux s'y était opposé, malgré le soutien PUBLIC d'une collectivité locale ! 15 ans plus tard l'inculture fait le lit de l'ultra-libéralisme et des populismes florissants.
On aura beau pointer du doigt le Brexit des Britanniques en leur reprochant leur "égoïsme" par-ci et leur "populisme" par-là, entre nous, quelles leçons prétendons-nous, nous Continentaux, de donner aux anglais aujourd'hui et hier? Si nous pouvons encore aujourd'hui prétendre au peu de démocratie qu'il nous reste, c'est à l'Histoire de ce pays que nous le devons! Leur modèle de concertation synodale fait partie des bases fondamentales dans l'exercice politique. On peut les critiquer autant qu'on veut: ils nous ont une fois encore prouvé que chez eux, "le peuple a parlé" (même si ça ne durera pas). Pouvons-nous en dire autant? Quand en 2005 le peuple français a dit "NON", les dirigeants d'alors ont tout simplement ignoré la volonté pourtant claire du peuple. Au lieu de crier au scandale, au lieu de continuer bêtement à réclamer "du pain et des jeux" à "César" (derrière qui seule une élite s'en met plein les poches au détriment des classes ouvrières), au lieu de prêter attention aux "mises en garde" des grands gourous de la Finance, au lieu de continuer à se prosterner devant la pensée unique et le politiquement correct, ce Brexit est sans doute la dernière opportunité pour nos peuples anésthésiés de se réveiller de cette fausse "pax romana" et vivre pleinement leur liberté en réapprenant à dire "ainsi le peuple a parlé"..! Toute mon admiration et mon respect envers nos amis et frères britanniques, quoi qu'il arrive ;-)
En somme, Calogero, vous pensez que Vox populi, vox Déi...? De fait "le peuple a parlé", dites-vous. C'est vrai formellement. tellement superficiellement, sur fond de démagogie, que "le peuple" voudrait revoter... Vous avez raison, nous n'avons pas de leçons à donner. Mais de là à faire de cet épisode un modèle de démocratie, c'est possible du seul point de vue formel. En profondeur, l'Ecosse aussi a voté. Son vote se fond dans la masse...
Critiquer la manière et le fond du Brexit n'exclut pas d'admirer le peuple anglais! fgh