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Johnny Hallyday (1943-2017), entre idole et icône

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24H après Jean d'Ormesson, voici Johnny Hallyday qui tire sa révérence.

Deux figures tutélaires, respectivement dans les domaines des lettres et de la chanson.

La disparition de la star aux 110 millions d'albums vendus et aux 1000 et 1 concerts géants (de Paris à Kinshasa) constitue un événement qui dépasse de loin la sphère du "people" ou des faits divers.

Qu'il soit idole ou icône (ce n'est pas la même chose, lien), Johnny Hallyday a cristallisé une telle ferveur que son itinéraire exceptionnel interroge les sciences sociales des religions ainsi que l'histoire et l'anthropologie culturelle de la France, de la Belgique, de la francophonie.

Doté d'un charisme phénoménal, d'une proximité hors du commun avec le public, mais aussi d'une force de travail titanesque (il a plus "bossé" que tous les autres, Charles Aznavour excepté peut-être), ce survivant, résilient et flamboyant, laisse aujourd'hui bien des orphelines et des orphelins.

Dont son ami Bill Deraime, bluesman et chanteur de Gospel, aujourd'hui oblat bénédictin (lien).

Curieusement (mais il y a des raisons à cela, pas toujours reluisantes), très peu de chercheurs en sciences sociales se sont intéressés de près à cette immense star de la chanson francophone, en dehors de rares exceptions comme cet ouvrage collectif dirigé par John Gaffney and Diana Holmes (Stardom in Postwar France, 2007, lien).

 

Circulations transatlantiques

Sous l'angle des circulations culturelles transatlantiques, je signalais pour ma part, dans l'ouvrage Du ghetto au réseau (2005), la proximité de Johnny et des évangéliques dans le rapport à l'Amérique: une référence assumée, mais en même temps, profondément réappropriée à l'intérieur du creuset français et francophone:

 "La majorité du courant évangélique français actuel est au reste du protestantisme ce que Johnny Hallyday et Eddy Mitchell sont à la chanson française. L’influence américaine est souvent sensible, dans le décorum, certains thèmes, références musicales (Blues et Rock’n’Roll chez les uns, Gospel chez les autres), l’affirmation individuelle aussi. Mais en même temps, la marque franco-française est indéniable. Pas plus que Johnny Hallyday ne passera jamais pour un rocker texan, un protestant évangélique français ne pourra passer pour un croyant de la Bible Belt" (SF, Du ghetto au réseau, 2005, p.274).

Commentaires

  • Bonjour Mr Fath.

    La comparaison ! (en surligné) ...

  • Grand monsieur aussi que Johnny (dans un autre style que Jean d'Ormesson), un grand monsieur de la chanson française, au même titre que les Trénet, Brassens, Brel, Bécaud, Féré, Nougaro, Aznavour, etc... On peut dire que la France vient de perdre son Elvis Presley!!!
    Maintenant, le côté idole et même icône, ce sont des choses bien humaine qui m'ont toujours un peu "gêné"! Quand j'entends un fan dire que: "Johnny, c'est mon dieu", je trouve ça bien triste! Face à la mort, on est tous des êtres humains à égalité qu'on s'appelle Johnny, Michael (Jackson), Kennedy ou M. Dupont.
    Ma seule idole à moi, c'est Jésus, le Fils de Dieu qui est mort à ma place et qui m'offre l'accès au trône de la grâce! De Jésus je suis un fan absolu!
    Tout le reste, n'est que vanité sous le soleil comme le disait l'Ecclésiaste!
    Ceci dit, le décès d'une personne, c'est toujours triste, d'autant plus quand on a pas d'espérance...
    Sincères condoléances.

  • Il n'est pas certain que Johnny n'avait pas d'espérance. Seul Dieu sonde les coeurs. On le voyait parfois arborer une croix. Par ailleurs, il était en contact avec des évangéliques et ceux qui ont lu "Ourane" - livre racontant la vie d'un Algérien d'Oran devenu aveugle dans son enfance, devenu accordeur de piano par la suite - savent qu'il a côtoyé Johnny et lui a témoigné de sa foi.
    (Cf. https://livre.fnac.com/a3493709/Samuel-Grandjean-Ourane).

  • Patrick B a raison: qui sait ce qu'il en est du rapport personnel à Dieu de JH, qui portait ostensiblement une croix, mais sans jamais commenter cette option?
    la distinction entre "icône" et "idole" devrait être travaillée par les médias, qui font tout pour réifier l'image, à force d'héroïser les personnes, dont les mouvements intimes, les questionnements sont pris dans la gelée statufiante.
    Sans être "fan", j'appréciais Johnny, aussi pour sa manière d'accepter son âge, et, au final, sa maladie. Mais il me semble qu'une de ses chansons dit "on m'appelle l'idôle des jeunes, mais...". Ce "mais" devrait être poursuivi, complété.
    Un autre point qui manque dans les hommages unanimistes, c'est de considérer l'importante socio-économique de la question. Quand le virtuose Eric Orsenna répète de plateau en plateau que l'important c'est la "légèreté", pas la "pesanteur", on peut le comprendre comme un éloge de l'art de la conversation de Jeand'O. Mais on peut aussi déplacer le regard vers les "sans voix", les SDF, ceux qui sont "au bord du monde" (cf.film de ce titre), qui, certes peuvent nous donner, eux aussi, des leçons de légèreté à travers leur non-plainte et leur regard dépouillé sur autrui, mais pour eux c'est à un prix tout autre que celui de l'esprit des salons que sont certains plateaux télé. Pour eux c'est bien dans une pesanteur hyperlourde et dense, écrasante –même quand ce n'est pas le monde que les démunis portent, comme Atlas, mais ce qui paraît "destin" insurmontable –, que la légèreté, insoutenable (Kundera) de l'être leur arrive aux lèvres, mais daans des cris blancs, atones, sans "conversation" pétillante. (De ce point de vue, Johnny est plus près d'eux que l'exquis JdO.)
    Les académiciens sont des êtres qui, sans nul doute, ont eux aussi souffert et connu ces pesanteurs, il faut leur en faire crédit. Mais ne pourraient-ils pas, aussi apprécier leurs collègues à l'aune de leur considération des plus démunis? Réfléchir à l'importance de la "fortune" dans le "succès"?
    En somme, c'est ainsi qu'ils pourraient évoquer la "spiritualité" de leurs "héros" autrement qu'en termes d'intentions, de ton, de style.
    gef

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