Trois générations d'historiens du christianisme, dont la mienne, doivent une fière chandelle à Jean Delumeau, qui a tiré sa révérence cette semaine à l'aube d'une nouvelle décennie.
Historien des mentalités religieuses et du christianisme entre Renaissance et époque moderne, doté d'une immense culture, d'un sens hors pair du temps et d'une fibre anthropologique prononcée, jamais pédant, toujours bienveillant, il nous a laissé une oeuvre immense, scandée par des honneurs ô combien mérités (académicien en 1989).
Historien de la peur et du pardon, du paradis et de l'enfer, particulièrement attentif aux imaginaires millénaristes et aux utopies prophétiques, il aimait placer ses lunettes d'observation du côté des fidèles, dans leur empirie, leurs turpitudes, leurs pratiques et leurs espoirs, plutôt que du côté des institutions et des textes normatifs (dont il n'ignorait cependant pas l'importance).