Mes collègues le savent: je plaide depuis plusieurs années pour que l'on crée en France un ou deux postes CNRS qui permettent d'étudier l'athéisme du point de vue des sciences sociales. Situation incroyable (si je puis dire): dans un pays qui compte plus d'agnostiques et d'athées que de pratiquants religieux (toutes religions confondues), personne n'étudie spécifiquement, au CNRS et en sciences sociales, l'athéisme et l'agnosticisme contemporain!
Or, c'est un terrain passionnant....
Un terrain émaillé récemment par un inquiétant fait divers à Dechy (Nord) qui semble illustrer que l'athéophobie existe aussi en France (sans que l'Education Nationale paraissent s'en émouvoir localement, courage fuyons....): une athée menacée d'être "brûlée vive", en 2015, en France?
Du coup, qu'on me permette, avec humour, de dire "non à l'athéophobie", tout comme il importe de refuser islamophobie, judéophobie, antiprotestantisme, cathophobie etc...
En France: croire ou ne pas croire est une liberté précieuse.
Commentaires
Les athées sont précieux : ils nous permettent de nous remettre en question lorsqu'ils mettent le doigt sur nos contradictions, nos invraisemblances, nos errements.
Nous avons même intitulé un de nos articles : Michel Onfray, évangéliste du 21ème siècle
( http://surtout-ne-lisez-pas-ce-blog.blogspot.com/2015/03/michel-onfray-evangeliste-du-21eme.html )
Que l'athéisme et l'agnosticisme soient non seulement à respecter mais aussi à étudier scrupuleusement, en interaction et en discussion dépassionnées me paraît fondamental. Dans les milieux dits "chrétiens", cette appétence est on ne peut plus faible. Du coup la spécificité d'une foi qui se différencie de toute croyance ordinaire ne saurait se dégager, si ce n'est en se constituant en bastion et en tombant dans une sorte de paranoïa ambiante. C'est dommage.
En réalité les milieux chrétiens feraient bien de se rendre compte qu'ils se servent bel et bien dans le vivier des courants, techniques, modes athées et/ou agnostiques, et, s'appuyant sur leurs prémices, ils en gomment les références et pensent récupérer ces modes d'action et de pensée en en faisant des associations diverses qui toutes jettent un voile d'ignorance sur leurs présupposés en rajoutant simplement le qualificatif de "chrétien". Ainsi, le champ de la "relation d'aide" (oui mais chrétienne, alors tout va bien...) est en train de se constituer en véritable "marché" (au sens de Bourdieu, c'est-à-dire d'un espace de positions concurrentes en termes de force d'attraction symbolique). Rien pour réfléchir sur les principes mêmes. On y "fait du bien", il y a tellement de "misère". Et gare à quiconque veut questionner les arrière-plans et présupposés (tous empruntés au champ agnostique, ce qui est positif, à condition d'âtre fait consciemment et avec un contrôle "critique").
J'attends encore qu'on m'explique pourquoi je ne devrais surtout pas aller consulter "en ville" si j'ai des difficultés psychiques. Que demande-t-on à un boulanger, un dentiste, un mécanicien? D'être d'abord chrétien, compétent ensuite?
Oui, l'athéisme et l'agnosticisme sont d'autant plus nécessaires à réfléchir que...nous y sommes, nous en sommes tous.
Qui prétendra ETRE chrétien du matin au soir (non dans son statut de salut en Dieu) mais dans ses mouvements de pensée et désirs?
j'ai eu l'immense bonheur d'avoir pour enseignant de philosophie grand agnostique, Jean Toussaint Desanti. Ce fin connaisseur des Evangiles et de StAugustin disait simplement, face à son ami Maurice Clavel qui l'interpellait (après avoir, lui, connu une conversion spectaculaire), répondait simplement, affectueusement à son ami –" je n'ai pas cette expérience-là"...
Quand on comprend qu'être chrétien dépend d'une vraie Rencontre, tout change. On ne se presse plus pour coller des étiquettes aux autres, aux autres que nous sommes (aussi).
J'ajoute que le vrai athéisme est d'un courage inouï, quand il ne se complaît pas dans un dogmatisme effréné et peu accueillant. Ne l'ayant jamais rencontré, je préfère travailler sur l'agnosticisme, qui ne pose pas péremptoirement l'inexistence de Dieu, mais se contente de dire qu'il "ne sait pas". Ainsi dit l'admirable et émouvant Marcel Conche, par exemple. Nous avons grand besoin des athées et des agnostiques pour diminuer l'"interincompréhension réciproque" et clarifier les enjeux pour chacun, pour quiconque pense sans narcissisme ses oprtions de vie profondes.
gef
Moi je suis athée et je vous soutien