Il existerait un "paradoxe évangélique", avec d'un côté, un protestantisme évangélique qui s'appuie sur le cadre de la pluralisation et de la laïcisation pour consolider son essor, et, de l'autre, un évangélisme qui s'inscrit en tension avec la sécularisation, voire conteste certains aspects de la laïcisation.
David Koussens, professeur à l'Université de Sherbrooke et titulaire de la chaire de recherche Droit, Religion et Laïcité, résume très bien ces enjeux dans le développement suivant:
"Dans de nombreux contextes nationaux, les groupes évangéliques ont été grandement bénéficiaires des processus de laïcisation de l'Etat et de ses institutions. (...) Toutefois, s'ils en ont été des bénéficiaires, les évangéliques en deviennent bien souvent aujourd'hui des contestataires actifs".... en particulier aux Etats-Unis et au Brésil (Le paradoxe évangélique, introduction, p.9).
Pour éclairer ces questions, saluons le très beau livre collectif, fruit d'un colloque, publié il y a quelques mois par les presses de l'Université Laval sous la direction de David Koussens, Guy Bucumi, Brigitte Basdevant-Gaudemet.
Cet ouvrage passionnant est consacré au "paradoxe évangélique", et se présente comme une contribution à un projet de sociologie internormative et sociohistorique de la laïcité analysant la pluralité des discours sur le religieux et sur la laïcité, ainsi que leurs médiations juridiques, et plus largement sociétales.

L'actualité récente, venue du Kenya, nous le rappelle : l'épouvantable drame de la secte de Shakahola, intitulée "Église internationale de la Bonne Nouvelle", invite à la vigilance. En attendant l'enquête, les premiers éléments de ce dossier révèlent des logiques d'emprise écrasantes, doublées d'une forme de clôture de la communauté, et de prescriptions ascétiques extrêmes (jeûne jusqu'à la mort "pour rencontrer Jésus"). Autant dire que la lutte contre les dérives sectaires est une exigence citoyenne, qui peut sauver des vies. 
